La dépression prenant de plus en plus de place dans notre société,
il paraît normal que les artistes qui cherchent à décrire
cette dernière aient élaboré une esthétique
pouvant s'agencer avec la maladie. Mon travail cherche à réfléchir
sur la nature que pourrait prendre une telle esthétique, mais en
recourant à un troisième concept qui, à première
vue, n'est ni associé à l'art, ni à la dépression.
Ce concept est l'entropie. Mon hypothèse est que le concept scientifique
ouvre une perspective spatio-temporelle qui aiderait à la compréhension
de certains caractères communs aux trois principes. Je n'ai pas
l'intention de prouver la véracité de cette idée
d'une manière irréfutable, mais plutôt de montrer
le parcours qui m'a permis d'y arriver.
La tendance
à l'homogénéisation, l'irréversibilité
temporelle et le rôle des contraintes sont, à mon avis, des
aspects primordiaux, à la fois dans une réflexion sur l'entropie,
sur l'art et sur la dépression. Ma recherche a permis de dégager
ces aspects comme dénominateurs communs potentiels entre les principes.
Je propose donc d'analyser ces éléments en relation avec
une installation vidéo : Third Party (1999) de Sam Taylor-Wood.
Cependant, il me faudra également expliquer comment ces notions
peuvent êtres pertinentes dans le cadre d'une réflexion sur
l'entropie et la dépression.
Présentation de l'uvre
Third
Party (1999), constitue l'une des réalisations importantes
de l'artiste par son thème et son ampleur.
De
manière détaillée, l'installation, telle que présentée
au Musée d'art contemporain de Montréal, se situe dans une
salle obscure munie d'une seule entrée (E). Les sept écrans
(1 à 7) que comporte l'installation sont répartis sur les
quatre murs. Chaque écran offre un point de vue différent
de la salle qui, ensemble, recomposent plus ou moins bien l'espace tel
qu'un spectateur (S) aurait pu le voir s'il s'était tenu au centre
de la pièce lors du tournage. Ces points de vuesse concentrent
sur différents personnages de l'installation (représentés
par des cercles). Un seul écran ne présente pas de personnages,
montrant plutôt un cendrier et des verres sur une table (5). La
plupart des écrans sont associés à une caméra
fixe (1,2,4,5,6) ou n'offrent que très peu de mouvement (3). Un
seul écran affiche les mouvements fréquents d'une caméra
pivotant sur elle-même (7). L'écran le plus imposant (3)
fait face au spectateur lorsqu'il entre dans la salle. Il présente
le visage en gros plan de la chanteuse et actrice Marianne Faithfull qui
balaie la salle de son regard. L'écran à gauche de la porte
(1) montre un personnage barbu interprété par Ray Winstone.
À côté de cet écran, on peut voir la silhouette
d'une femme dont la tête dépasse le cadre de l'écran.
Face à elle, un écran vertical présente une femme
de plein pied dansant au rythme de la musique (4). Les écrans à
droite de la porte montrent un homme (7) et une femme (6) discutant en
plan semi-rapproché. La projection dure environ dix minutes et
est présentée en boucle. Ainsi, l'uvre par son contenu
et sa forme, exploite différents niveaux de spatialités
et de temporalités qui alimenteront notre analyse.
La Thermodynamique
Apparue dans le courant du XVIIIe siècle, l'entropie est une notion
découlant de l'étude des phénomènes thermodynamiques.
La thermodynamique est la branche de la physique qui étudie l'ensemble
des changements thermiques. Elle repose principalement sur deux lois.
La première de ces lois se résume dans le langage courant
par la formule de Lavoisier : « rien ne se perd, rien ne se crée
» Elle énonce la conservation générale de l'énergie.
Peu importe les transformations apportées au sein d'un système,
l'énergie qui est quantitativement mesurable demeurera toujours
constante. Au XXe siècle, cette loi a atteint sa pleine étendue
grâce à l'apport d'Albert Einstein qui a généralisé
la matière sous une forme d'énergie. D'un point de vue large,
cette loi laisse entrevoir un monde immuable où rien ne change
véritablement.
La deuxième loi vient apporter un sérieux bémol à
cette promesse de permanence et d'immuabilité. Elle nous apprend
que même si la quantité totale d'énergie est constante,
« les transferts de chaleur spontanés s'opèrent toujours
et exclusivement des corps chauds vers les corps froids. » [1]
En conséquence, un système fermé rempli d'une moitié
d'eau chaude et d'une moitié d'eau froide aura une tendance naturelle
à s'homogénéiser jusqu'à atteindre progressivement
un état stable où il n'y aura plus de différence
mesurable entre les particules chaudes et les particules froides. D'autres
processus semblables à celui de la dissipation de la chaleur ont
été identifiés comme la diffusion de la matière
et la désintégration des substances radioactives. Ces réalités
« traduisent toutes, en définitive, une dissipation d'énergie
sous forme de chaleur. » [2] Dans chaque cas,
la première loi ne se trouvera pas démentie ; le niveau
global d'énergie demeurera constant. Cependant, l'état atteint
ne pourra revenir spontanément à l'état initial ou,
à tout le moins, la probabilité qu'une telle chose se produise
est infinitésimale. À moins de faire intervenir un élément
de l'extérieur, nous ne verrons jamais l'eau tiède se diviser
d'elle-même en eau froide et en eau chaude. Nous pouvons donc déduire
que la transformation qui s'est effectuée est irréversible.
L'entropie devient alors la mesure de ce qui a été perdu
: les transformations qui ne peuvent plus être défaites ou
refaites.
La monotonie à
l'état d'entropie maximale
La deuxième loi de la thermodynamique a d'abord touché l'imaginaire
par l'annonce irrépressible qu'elle fait de l'imminence d'un état
d'entropie maximale. Cet état est souvent identifié à
un état de mort, de désordre absolu, d'indifférenciation
entre les particules. Plus un système fermé se rapproche
de l'équilibre plus les écarts de tension sont faibles.
Conséquemment, le mouvement producteur d'entropie devient de moins
en moins important. Les transformations qui surviennent alors dans le
système perdent de leur signification, c'est du pareil au même,
d'où l'impression de monotonie qui « signifie absence de changement
ou tout au moins mélange de changement et de stabilité »
[3].
La monotonie est l'impression qui semble être « la plus communément
éprouvé dans l'ennui. » [4] L'ennui
et la monotonie sont des états qui préoccupent certains
artistes contemporains. C'est, du moins en partie, le cas de Sam Taylor-Wood.
L'installation Killing Time (1994) montre quatre individus qui
luttent contre l'ennui en faisant du lipsync sur l'opéra
Elektra de Richard Strauss. Les séries Five Revolutionary
Seconds et Soliloques présentent souvent des personnages
las ou enfermés dans leurs rêveries. De même, l'ennui
est sans conteste l'impression la plus palpable lors de la fête
à laquelle nous convie l'artiste dans son installation Third
Party. Les personnages présents au sein de l'installation manifestent
en général une profonde apathie. Le visage de Marianne Faithfull
lâche de nombreux soupirs, on peut voir la femme regarder de part
et d'autre de la pièce, mais elle ne se trouve jamais porteuse
d'une réelle action. Le personnage de Ray Winstone soupire aussi,
on le verra se lever à quelques reprises, mais toujours pour le
voir retourner à sa place. Entre les deux, la silhouette de la
femme dont la tête sort du cadre de l'image peut être jugée
comme étant celle d'« une personne sans expression. »
[5] Face à elle, la jeune fille qui danse
sur le rythme monotone de la musique qui règne dans la salle semble
également dans son propre monde. Il n'y a guère plus d'événements
dans les autres écrans : deux personnes conversent, il semble même
s'agir d'une scène de séduction, mais le son ne nous permet
pas réellement de saisir ce qui est dit. De manière générale,
l'ensemble des individus au sein de l'installation semble aussi figé
que le cendrier. Cette immobilisation générale des personnages
contribue à ce que l'on pourrait qualifier d' « esthétique
de la monotonie », impression que la présentation en boucle
de l'installation à pour effet de prolonger de manière indéfinie.
Alain Ehrenberg, dans son livre La fatigue d'être soi, définit
la dépression comme étant « l'absence de mouvement
dans son aspect mental. » [6] Pierre Fédida,
au sein Des bienfaits de la dépression, offre une proposition
semblable. Il apparente la maladie « à une immobilisation,
à un empêchement de ressentir les moindres mouvements de
la vie interne et extérieure. » [7]
Il y a donc une communauté d'esprit entre la monotonie perçue
à l'état d'entropie maximale et celle ressentie par le dépressif.
Cependant, ce sur quoi j'aimerais insister ici est que dans les deux cas,
l'immobilisation, qui correspondrait à une certaine mort psychique,
est d'avantage une question d'une perception que d'une réalité
pure et objective. Fédida parle d'un « empêchement de
ressentir » le mouvement. De même, l'état d'entropie
maximale ne consiste en aucun cas en une absence réelle de mouvement,
mais plutôt d'un changement d'échelle au sein de celui-ci.
En fait, ce qui paraît uniforme et stable d'un point de vue macroscopique
peut paraître complètement hétérogène
à plus petite échelle. Je montrerai plus tard qu'il en est
de même pour l'installation de Sam Taylor Wood. La monotonie apparente
de l'installation, pourrait révéler, à une autre
échelle, une certaine complexité.
À mon avis, il importe de distinguer « l'esthétique
de la monotonie » que je viens de décrire d'une véritable
esthétique de la dépression. Je ne prétends pas que
ces deux esthétiques soient en opposition. Cependant, l'état
de monotonie propre à la mort entropique constitue la conséquence
finale de l'évolution d'un système fermé proche de
l'équilibre. Ce que nous avons fait est un rapprochement entre
la mort d'un système et une certaine mort de l'esprit comme aboutissement
de l'état dépressif. Toutefois, le processus même
de la dépression n'a pas été expliqué. Pour
que l'entropie puisse nous aider dans cette démarche, il serait
plus profitable d'étudier le processus qui mène à
cet état final. Ce qui correspond à ne plus étudier
l'état mort comme tel, mais le fait de s'en approcher, c'est-à-dire
la perte.
L'allégorie et
l'irréversibilité temporelle
D'un point de vue psychanalytique, la perte est un concept particulièrement
important lorsqu'il est question de mélancolie, sentiment considéré
à l'origine de la dépression. Selon Mélanie Klein,
« le processus fondamental de la mélancolie est la perte de
l'objet aimé. » [8] La mélancolie
trouverait son fondement dans une première expérience de
perte constitutive vécue chez le bébé à son
apogée autour de la période de sevrage. Ce stade du développement
serait le théâtre de l'ébauche de ce que la psychanalyse
nomme la « position dépressive » qui aurait un impact
crucial sur le « développement normal d'un enfant et son aptitude
à aimer. » [9] L'hypothèse en
question repose sur l'idée que le sevrage éveille une «
mélancolie in statu nascendi. » [10]
Le sein maternel, pour l'enfant, représentait un ensemble de besoins
fondamentaux : « l'amour, la bonté et la sécurité.
» [11] En perdant le sein, le sentiment de
toute-puissance qu'éprouvait l'enfant envers sa capacité
de combler ses besoins de manière immédiate se trouve ainsi
compromis. La position dépressive correspond à l'angoisse
de perdre les bons objets qui répondent aux désirs de l'enfant.
« Cette perte extérieure [
] n'aboutira dans la vie ultérieure
à un état dépressif que si, pendant cette période
précoce de son développement, le petit enfant n'a pas réussi
à installer son objet d'amour à l'intérieur de son
moi. » [12] c'est-à-dire de se créer
et de faire vivre, dans un processus d'introjection, une mère intérieure,
constituant un objet complet se rapprochant de la réalité,
qui réussirait à calmer ses angoisses. La maladie est associée
à l'échec de la position dépressive. Un des mécanismes
de défense possibles se trouve dans « les efforts pour sauver
l'objet aimé, le réparer et le restaurer. » [13]
Ces fantasmes constructeurs s'alignent sur l'idéalisation de bons
objets qui s'accompagnent de sentiments de négation et de toute-puissance
qui sont tous des parties essentielles de la polarité inverse de
la position dépressive, ce que Mme Klein appelle « la position
maniaque. » [14]
Sans aller dans le détail de la théorie, les théories
de Mélanie Klein peuvent constituer une base à la poursuite
de notre démarche. Alexandria Triandafilidis, dans son livre La
dépression et son inquiétante familiarité, Esquisse
d'une théorie de la dépression dans le négatif de
l'uvre freudienne, a revisité ces théories autour
de la position dépressive chez le nourrisson. Elle note à
juste titre que « lorsque l'enfant idéalise l'objet, on peut
supposer qu'il hallucine l'état pré-natal dont il a la
nostalgie. Sa tentative vise donc bien, non pas à récupérer
un objet, mais à retrouver un état. » [15]
Elle ajoute « c'est l'état irremplaçable et impossible
à restaurer, où il y a conformité absolue entre ce
qu'il a, entre ce qu'il veut et ce qui est. » [16]
Cette insistance sur l'évolution irréversible d'un état,
en l'occurrence la naissance, constitue, à mon avis, un nouvel
élément qui nous permet de continuer l'analogie avec l'entropie.
La deuxième loi de la thermodynamique considère la perte
comme n'étant pas reliée à un objet comme tel, puisque
la quantité d'énergie est constante, mais plutôt à
une évolution qualitative. La deuxième loi de la thermodynamique
n'analyse pas des objets en soi mais plutôt les relations entre
ces objets. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle elle s'est trouvée
trop souvent négligée par certains physiciens qui la trouvaient
trop subjective. Pour revenir à notre réflexion, c'est peut-être
parce que la restauration d'un état implique non seulement une
rétrocession quantitative des objets mais également le rétablissement
des relations entre ceux-ci, qu'elle se trouve, dans les faits, impossible
à réaliser. L'état d'un système doit plutôt
être envisagé comme l'incarnation même du temps qui
passe.
L'allégorie, dans le contexte de la mélancolie, constitue
une tentative pour restaurer un objet perdu. En considérant l'irréversibilité
des évolutions que nous venons de décrire, il devient alors
évident que cette manifestation ne peut que réussir partiellement
et être plus souvent qu'autrement associée à un échec.
En se positionnant sur l'hypothèse de Mélanie Klein, on
retrouve peut-être ici un désir maniaque de réparation
des bons objets. Objets qui se trouvent idéalisés en s'alignant
sur des fantasmes de négation et de toute-puissance. L'allégorie
ne réussit jamais qu'à restaurer partiellement ce qui est
perdu. Pire, au lieu de diminuer la perte elle peut parfois au contraire,
y participer et même l'accroître. Les ruines sont considérées
par Benjamin comme l'emblème allégorique par excellence
[17]. Elles constituent les fragments des objets
extérieurs qui ont été détruits et que le
sujet ne parvient pas à reconstruire. Ils sont les traces de l'état
perdu et éveillent sa mémoire.
La photographie pourrait également constituer un moyen de garder
des traces : «photography, we might add, as an allegorical art, then,
photography would represent our desire to fix the transitory, the ephemeral,
in a stable and stabilizing image. » [18] Pendant
un temps, la photographie a paru comme une manière de conserver
« ce qui a été ». Cependant, la période
postmoderne nous permet de comprendre que même les images peuvent
paraître périmées.
L'utilisation de la photographie comme élément pouvant freiner
les pertes issues des transformations irréversibles est loin d'être
absurde d'un point de vue thermodynamique. Bon nombre de chercheurs s'intéressant
à l'entropie ont fait un rapprochement entre l'information et la
néguentropie, c'est-à-dire l'énergie potentielle
qui n'a pas encore été transformée en entropie. L'entropie
est la conséquence d'une consommation de néguentropie. Cette
dernière diminue au fur et à mesure que l'entropie croit.
Cependant, une partie de la néguentropie consommée peut
se retrouver sous forme d'informations. En mémorisant un texte,
il devient possible de le reproduire même si l'original est détruit.
Cependant, le fait même de mémoriser le texte et de le reproduire
produit aussi une certaine quantité d'entropie. « En définitive,
l'information est un moyen de stocker la néguentropie disponible,
pour l'utiliser ensuite à notre convenance. Elle permet de diminuer
provisoirement le bilan d'accroissement d'entropie, mais sans toutefois
le renverser. » [19] Il faut toutefois être
prudent avec cette perspective, l'information, telle que conçue
par les physiciens, correspond à une propriété statistique.
En ce sens, un système ordonné qui contient beaucoup d'information
coïncide avec un état qui est peu probable d'arriver de manière
aléatoire. L'ordre et l'information ne sont généralement
pas interprétés de cette manière dans le sens commun.
Selon Rudolf Arnheim, ces notions sont plutôt interprétées
comme des propriétés de structure [20].
Considérant ces différences de nature, le rapprochement
entre néguentropie et information doit être accompagné
de réserves. Pour l'instant, je me contenterai d'émettre
l'hypothèse selon laquelle une transformation donnée, parallèlement
à la création d'entropie, peut également produire
une certaine quantité d'énergie potentielle. Cette néguentropie
créée sera toutefois inférieure à la production
d'entropie totale. Elle peut néanmoins constituer le germe d'une
transformation future.
J'ai préalablement tenté d'expliquer comment l'installation
de Sam Taylor-Wood suggérait l'absence de mouvement apparent. La
présentation en boucle de la projection prolongeait cette relative
apathie de manière perpétuelle. La présence de Marianne
Faithfull, en gros plan sur l'écran principal, implique d'approcher
le problème sous une nouvelle perspective. Marianne Faithfull est
l'incarnation même du sex, drugs and rock n'roll tel qu'il
a émergé dans les années soixante. Ancienne copine
de Mick Jagger, elle est reconnue pour avoir vécu l'ensemble des
excès associés à cette époque. Ses problèmes
de drogue ont constitué un sérieux obstacle au prolongement
de sa carrière d'interprète pendant plusieurs années.
Pendant les années soixante-dix, elle a fait plus l'objet des journaux
à potins que des revues musicales. Depuis, elle a toutefois sorti
plusieurs disques qui lui ont permis de renouer avec le succès.
Elle a également publié une autobiographie en 1994. Dans
l'installation, l'image de la femme qui regarde de manière passive
prend un autre sens si l'on considère le fait qu'il s'agisse de
Marianne Faithfull. Par sa manière de doubler l'image d'une nouvelle
signification, on peut qualifier cette présence d'allégorique.
Sam Taylor-Wood dira qu' « elle place immédiatement l'uvre
dans une atmosphère et dans un contexte qu'il serait difficile
d'exprimer d'une autre manière. » [21]
Bien que l'on puisse dire que la présence de Marianne Faithfull
est de nature allégorique, il est moins évident de dire
si elle s'effectue dans un contexte de mélancolie. Il est clair
qu'elle marque la disparition d'une époque. Le spectateur ne peut
que noter la dissemblance entre les excès que l'on connaît
des fêtes qu'a vécues Mme Faithfull dans son passé
et la monotonie qui fait l'objet de celle de Third Party. Cependant,
il serait difficile de voir ce changement vécu comme une perte.
L'allégorie ne semble pas découler d'un désir de
reconstruction. De même, le visage de Marianne Faithfull qui porte
les effets des années ne semble pas véhiculer de la nostalgie.
Cette impression est peut-être attribuable au fait, qu'en entrevue,
la chanteuse pose aussi un regard très critique sur les années
soixante [22]. Par le fait même, une ambivalence
s'installe sur le regard que porte Mme Faithfull sur la fête des
années quatre-vingt-dix, et par extension, sur la société
actuelle. Malgré la monotonie ambiante, il semble qu'un deuil est
fait ou est en train de se faire.
La perte se trouve présente à un autre niveau au sein de
l'installation. Aussi faible soit-il, l'installation comporte un élément
narratif. Le personnage Barbu à droite, interprété
par Ray Winstone, apparaît être le copain de la femme sur
l'écran en face de lui. Cette femme converse avec un autre homme
situé sur l'écran voisin de la porte. La conversation semble
agréable, il semble même y avoir un élément
de séduction de part et d'autre. Le personnage de Ray Winstone,
jaloux, cherchera à attirer l'attention de certaines autres femmes
représentées dans la pièce, d'abord la femme assise
à côté de lui, puis la femme dansante sur l'écran
au fond à gauche. Après être sorti de son cadre et
s'être approché de cette dernière, le regard qu'il
posera ne laissera aucun doute de l'objectif qu'il a de rendre sa compagne
jalouse, ce qu'il ne réussira toutefois pas très bien, retournant
plutôt s'asseoir à sa place. Il se décidera enfin
à demander à sa compagne de quitter les lieux. Pendant un
court laps de temps les deux individus sortiront de leurs écrans
respectifs se rejoignant hypothétiquement au centre de la pièce.
La femme réussira à convaincre son compagnon d'attendre
cinq minutes. Celui-ci retournera s'asseoir à sa place pour le
reste de la projection.
Comme je l'ai dit précédemment, cette scène s'avère
être une scène de perte, le personnage de Ray Winstone, craint
de perdre sa compagne -- Mélanie Klein ajouterait peut-être
qu'il est aussi en train de reperdre le sein de sa mère. Afin de
se prémunir contre la perte, le personnage a élaboré
certains mécanismes qui se sont soldés par un échec.
Ces mécanismes pourraient être perçus comme une agression
envers l'objet aimé : « Je l'aime (semble dire le dépressif
à propos d'une perte ou d'un objet perdu), mais plus encore je
le hais; parce que je l'aime, pour ne pas le perdre, je l'installe en
moi; mais parce que je le hais, cet autre en moi est un mauvais moi, je
suis mauvais, je suis nul, je me tue. » [23]
La tentative de rendre jalouse sa partenaire est une tentative pour l'agresser,
mais plus encore pour agresser la partie d'elle qu'il a intériorisée.
Considérant son incapacité à changer la situation,
le personnage entre dans une position de repli sur soi. Ce que j'aimerais
ici commenter est la différence entre deux mécanismes de
défense face à une situation de perte. La première,
active, se rapporterait plus d'une position maniaque. Le désir
de réparation de l'objet (ou de l'état) s'installerait dans
un « Faire » qui ne peut qu'échouer. L'allégorie
telle qu'elle a été décrite dans une perspective
mélancolique serait une manifestation de cette entreprise maniaque.
Dans la polarité inverse, le mélancolique abandonnerait
ses fantasmes de toute-puissance pour plutôt se retourner sur lui-même
dans un mouvement de fermeture au monde extérieur. C'est la position
finale du personnage de Ray Winstone. Ce serait cet état de fermeture
qui constituerait la caractéristique fondamentale d'un épisode
dépressif.
Systèmes fermés
et ouverts, l'importance des contraintes
L'homogénéisation progressive que j'ai décrite jusqu'à
maintenant semble être en opposition avec la complexité et
l'organisation connue chez le vivant. Pourtant, certaines recherches récentes
tendent plutôt à montrer que la vie n'est pas du tout en
opposition avec la production d'entropie. Ce serait plutôt le contraire.
Les systèmes évoluant de manière irréversible
vers un état d'entropie maximale évoluent en réalité
au sein de systèmes fermés proche de l'équilibre.
Or, à l'échelle humaine, la plupart des systèmes
ne sont pas complètement fermés. Les systèmes qui
nous entourent sont plutôt des systèmes semi-ouverts qui
échangent de l'énergie à l'intérieur d'ensembles
plus vastes. Il s'agit de systèmes complexes loin de l'équilibre.
De manière générale, le degré d'entropie de
l'univers croit sans cesse. Cependant, à plus petite échelle,
des structures peuvent apparaître et être maintenues grâce
à l'échange d'entropie qu'elles entretiennent avec l'extérieur.
De cette manière, un organisme vivant peut combler les pertes entraînées
par les transformations internes qu'il a subies en allant puiser de l'organisation
potentielle (de la néguentropie) au sein du monde qui l'entoure.
Déjà, il y a plus d'un siècle, Boltzmann écrivait
que la lutte pour la survie des êtres animés, n'était
pas une lutte pour l'énergie, qui est abondante, mais plutôt
« une lutte pour l'entropie, qui n'est rendue disponible qu'à
travers la transition de l'énergie du Soleil chaud à la
Terre froide
» [24]
Ce que fait ressortir l'existence de ces systèmes partiellement
ouverts est le rôle primordial que jouent les contraintes au sein
de notre univers. Un système pour demeurer animé doit comporter
suffisamment de contraintes pour l'empêcher de passer, de manière
immédiate, d'un état à forte néguentropie
à un état d'équilibre, c'est-à-dire d'entropie
maximale. Par contre, pour qu'elles puissent se maintenir, ces contraintes
ne doivent pas se traduire en une fermeture du système qui provoquerait
sa propre mort, puisqu'il bloquerait l'accès à une source
de néguentropie extérieure. Dans des circonstances favorables,
« la théorie (développée notamment par Prigogine
et l'école de Bruxelles) montre comment, dans la quête même
des systèmes pour retourner ou se maintenir le plus près
possible de l'état d'équilibre, ceux-ci peuvent acquérir
et maintenir des structures [dissipatives] remarquables. » [25]
Fréquemment, ces structures présenteront des régularités
spatiales (motifs ordonnés) ou des récurrences temporelles
(cycles) [26] à l'opposé de l'évolution
vers une homogénéisation progressive telle que préalablement
décrite pour les systèmes près de l'équilibre.
Dans la première partie de ce travail, j'ai déjà
fait un lien entre la dépression et l'état d'équilibre
thermodynamique. Les deux semblaient présenter une réduction
qualitative du mouvement. D'autre part, l'analyse des éléments
narratifs au sein de l'installation de Sam Taylor-Wood faite précédemment
m'emmenait à comprendre la dépression comme étant
associée à une fermeture face aux autres, c'est-à-dire
à une rupture intersubjective. Ce que je propose est d'interpréter
l'immobilisation comme une réalité attribuable à
l'arrêt des échanges avec l'extérieur tant au niveau
thermodynamique qu'au niveau dépressif. La rupture intersubjective
constituerait l'équivalent psychologique et artistique de la fermeture
d'un système. L'association entre le physique et le psychique qui
est ainsi créée pourrait paraître à juste titre
abusive. Toutefois, sans prétendre à une concordance absolue,
il me semble tout de même pertinent d'explorer comment la psychanalyse
intègre certains principes de contrainte au sein de ses théories.
Pour Mélanie
Klein, la position dépressive se caractérisait par une angoisse
envers la survie des bons objets internes. Cette angoisse, pour être
surmontée, implique une capacité pour la vie psychique de
l'individu à assurer « protection, équilibre et régulation
à la vie. « Le bébé » acquiert dès
le début cette capacité dépressive d'ouverture/fermeture
au contact, de rythme, de résonance et ainsi de régulation
interne des excitations. » [27] Selon Pierre
Fédida, il y aurait donc une « différence qu'il convient
d'établir entre la dépressivité inhérente
à la vie psychique [...] et l'état déprimé
qui représente une sorte d'identification à la mort ou à
un mort. » [28] La vie psychique constitue
une capacité d'autorégulation interne qui n'est pas sans
rappeler celle intrinsèque aux systèmes complexes en thermodynamique.
La vie psychique serait néanmoins d'une complexité infiniment
supérieure. Elle demeure une caractéristique de l'adaptabilité
de l'individu et du pouvoir qu'il a sur ses propres contraintes.
La dépression
se conçoit, par ailleurs, comme un manque de dépressivité,
elle se caractérise par une fermeture. En rompant les échanges
avec l'extérieur, « la dépression vient annihiler la
dépressivité. » [29] Il n'y a
plus de jeux d'ouverture et la fermeture de contraintes régulant
les échanges avec l'extérieur, pour la simple et bonne raison
qu'il n'y a plus du tout d'échange avec l'extérieur. Toutefois,
la dépression se conçoit « non seulement comme une
brutalisation, mais aussi comme la mise en conservation du vivant sous
une forme inanimée. » [30] La dépression
survient lorsque les menaces extérieures à la vie psychique
du sujet sont perçues comme trop grandes. Ce dernier, en voyant
son équilibre précaire en danger préférera
se replier sur lui-même afin d'assurer la conservation de sa vie
interne. Le sujet entre alors dans un état d'hibernation [31]
se prémunissant contre les agressions d'un hiver glacial.
Ces dernières réflexions sur l'entropie et la dépression
entraînent une réévaluation de l'esthétique
de la dépression. Comme je l'ai déjà affirmé,
elle ne se manifesterait pas seulement par la monotonie, mais surtout
par une rupture des échanges avec l'extérieur. Il est difficile
d'imaginer une uvre d'art qui serait complètement fermée
sur elle-même. Concevoir une telle uvre qui ne chercherait
pas à entrer, même par un moyen détourné, en
relation avec un spectateur potentiel impliquerait une redéfinition
du concept même d'uvre d'art. C'est pourquoi j'ai tendance
à concevoir une esthétique de la dépression qui abonderait
dans ce sens comme un état limite auquel tendent certaines uvres
d'art, mais sans vraiment l'atteindre.
La première
partie de ce travail expliquait comment l'installation, Third Party,
de Sam Taylor-Wood, présentait une certaine apathie des personnages
et un faible coefficient événementiel. Cependant, j'ai également
laissé entrevoir que la monotonie apparente pouvait cacher une
réalité plus complexe. Les éléments allégoriques
et narratifs qui ont été exposés abondent dans ce
sens. Ce que je propose maintenant de faire est d'évaluer la disposition
des contraintes au sein de l'uvre. À mon avis, l'uvre
joue sur deux niveaux de fermeture et d'ouverture. L'un est à l'intérieur
même de l'uvre entre les différents personnages. L'autre
se situe dans la relation qu'entretient l'uvre avec le spectateur.
J'exposerai ces deux niveaux.
La division de l'espace en différents écrans a pour effet
de séparer les personnages les uns des autres. Ces derniers se
trouvent, par un moyen ou un autre, enfermés dans leurs petits
univers, emprisonnés dans une surface. Comme je l'ai expliqué
au début de ce travail, six des sept écrans de l'installation
présentent un point de vue fixe ou presque fixe. Les écrans,
d'une certaine manière, enferment les personnages qui s'y trouvent.
Ils sont coupés de l'extérieur, le cadre agissant comme
une frontière infranchissable sous peine de disparition. Pour unifier
l'espace, les échanges verbaux et non-verbaux entre les personnages,
par le biais notamment du regard, pourraient avoir un rôle prédominant.
Cependant, il n'y a que très peu d'échanges. Les tentatives
d'ouverture entreprises par les personnages ne reçoivent que très
peu de réponses. La danseuse et la femme à la tête
coupée n'offrent aucun regard. J'ai déjà parlé
des difficultés de communication du personnage de Ray Winstone.
Malgré les efforts qu'il manifeste, il ne parvient jamais à
avoir une réponse satisfaisante. Le visage de Marianne Faithfull
balaie constamment la salle de son regard, mais celui-ci n'est jamais
renvoyé. Il y a bien une exception, l'homme et la femme à
gauche de la porte en train de se séduire font preuve d'un échange
intersubjectif. Il y a cependant un étrange effet de double négativité.
Le point de vue sur l'homme est associé à la caméra
qui pivote sans cesse sur elle-même. Dans un sens, cette caméra
a pour effet d'unifier l'espace en montrant l'ensemble de la salle par
un balayage continu. D'un autre côté, il a également
pour conséquence de séparer les interlocuteurs. On voit
l'interlocuteur de la femme disparaître à plusieurs reprises,
l'écran affichant un autre point de vue de la salle. Elle se trouve
alors isolée paraissant parler dans le vide, à un autre
personnage ou à elle-même.
Cette ambivalence envers l'ouverture et la fermeture de l'espace entre
les personnages entraîne également une difficulté
de positionnement pour le spectateur. La multiplicité des points
de vues et la durée continue de la présentation éveillent
en quelque part le vieux rêve du plan séquence ininterrompu
de Pasolini. Il s'agissait là pour le réalisateur italien
de l'essence même du cinéma. Cependant, ce que l'installation
nous permet de réaliser est l'incapacité pour le spectateur
de saisir l'ensemble de l'information. Sam Taylor-Wood, à propos
de son installation, a dit : « Il s'agissait de donner un aperçu
de toute la soirée, mais trop bref pour que vous puissiez saisir
quoi que ce soit. » [32] Le spectateur n'a
qu'une vision fragmentée. Il est incapable de faire coïncider
l'espace projeté à un espace réel et, par le fait
même, de reconstruire un espace tridimensionnel à partir
des surfaces. De plus, il est limité par ses propres capacités
perceptives. Comme pour les uvres de la Série Five Revolutionary
Seconds de la même auteure, le spectateur ne peut voir l'ensemble
des éléments d'un seul regard, il est obligé de créer
son propre montage.
D'autre part, j'ai beaucoup insisté sur l'idée de la fête
dans Third Party, mais le titre peut également avoir la
signification de tiers partie. Lorsqu'il retourne s'asseoir à sa
place, le personnage de Ray Winstone s'adresse au spectateur : «
What I am doing here ? » La question demeurera sans réponse,
exposant la frontière infranchissable entre le personnage et le
spectateur. Ce dernier ne peut que balayer la salle de manière
impassible comme fait le visage de Marianne Faithfull. Renforcé
dans le rôle de tiers partie, il se trouve dans une situation d'ambivalence
face à l'installation. Il y est à la fois reconnu comme
présent et absent. L'aspect fragmentaire de l'état limite
où il se trouve le pousse à se redéfinir en tant
que spectateur. En quelque sorte, l'uvre est peut-être parvenue
à situer le spectateur dans une position dépressive.
Conclusion
L'entreprise que je viens de terminer cherchait à comprendre les
fondements de la dépression sous l'éclairage du concept
d'entropie et d'une installation vidéo. En reprenant le chemin
parcouru dans le sens inverse, la dépression apparaît comme
étant la conséquence d'une fermeture et d'un repliement
sur soi. Ce repliement est perçu par le sujet comme seule alternative
permettant de conserver sa vie psychique face aux agressions d'un environnement
menaçant. Il apparaît comme l'unique moyen pouvant répondre
à son angoisse d'une perte irréversible. Cette entreprise
de conservation aura toutefois des effets pervers. Elle aura pour conséquence
une immobilisation progressive du mouvement tel qu'elle l'a ressenti par
la personne rapprochant celle-ci d'une mort dans son aspect mental.
Lorsque j'ai terminé l'analyse de l'uvre par l'idée
d'une position dépressive potentielle à laquelle serait
confronté le spectateur, je m'interrogeais sur la réaction
de ce dernier. Considérant qu'il est impossible de reconstituer
la scène dans son entièreté, que le spectateur ne
peut y participer réellement, comment celui-ci doit-il réagir
? Doit-il s'acharner dans une lutte que l'on sait perdue d'avance ? Doit-il
rejeter l'uvre en se repliant sur lui-même ? Il apparaît
évident qu'aucune de ces réactions ne serait profitable
à l'individu. Ce dernier devrait plutôt accepter son statut
et apprendre de sa propre inaptitude.
Pierre-Yves
Tremblay
Montréal
- décembre 2002
1 - Lestiennes,
Rémy, Les Fils du Temps, causalité, entropie, devenir,
Paris, Presses du CNRS, p.168
2 - ibid
3 - Digo, René, De l'ennui à la mélancolie, esquisse
d'une structure temporelle des états dépressifs, «
Rhadamanthe », Toulouse, Edouard Privat, P.46
4 - Digo, op. cit., p.45
5 - Entrevue avec Sam Taylor-Wood, Par Clare Carolin in Steild
(hrsg.), Sam Taylor-Wood
6 - Ehrenberg, Alain, La Fatigue d'être soi, dépression
et société, Paris, Éditions Odile Jacob, 1998,
p.182
7 - Fédida, Pierre, Des bienfaits de la dépression :
éloge de la psychothérapie, Paris, Éditions Odile
Jacob, 2001, p. 7
8 - Klein, Mélanie, XVI, Contribution à l'étude
de la psychogenèse des états maniaco-dépressifs,
1934 in Essais de Psychanalyse, (1921-1945), Payot, paris, 1968,
p. 312
9 - Ibid, p. 340
10 - Klein, Mélanie, XVII, Le deuil et ses rapports avec les
états maniaco-dépressifs (1940) in Essais de Psychanalyse,
(1921-1945), Payot, paris, 1968, p. 342
11 - Ibid
12 - Klein, 1934, op. cit., p. 338
13 - Ibid, p.319
14 - Klein, 1940, p.347
15 - Alexandra Triandafillidis, La dépression et son inquiétante
familiarité, Esquisse d'une théorie de la dépression
dans le négatif de l'uvre freudienne, Collection Émergence,
Éditions Universitaires, 1991, p.56
16 - ibid
17 - « [
]the imperfect, the incomplete - an affinity which
finds its most comprehensive expression in the ruin, which Benjamin identified
as the allegorical emblem par excellence. » in Owen, Craig, «
The Allegorical Impulse : Toward a Theory of Postmodernism », in
Brian Wallis, dir. Art After Modernism: Rethinking Representation,
New York, The New Museum of Contemporary Art, 1988, p. 206
18 - Owen, op. cit. p. 207
19 - Lestiennes, op. cit., p.179
20 - Arnheim, Rudolf, Entropy and Art, An essay on disorder and order,
University of California press, Berkeley, Los Angeles, London, 1971
21 - Entrevue avec Sam Taylor-Wood, Par Clare Carolin in Steild (hrsg.),
Sam Taylor-Wood.
22 - « All the children today think how wonderful it was in the Sixties.
Well it was for everyone else, except me. » Williamson, Marianne
Faithfull, The Wild one in The London Times, Edition 1, SAT 05 JUN 1999,
Times Magazine, tel que répertorié sur le forum de discussion
du site Marianne Faithfull
Official Web Site.
23 - Kristeva, Julia, Soleil Noir, dépression et mélancolie,
Gallimard,1987, p.20
24 - Boltzmann L., 1886, Theoretical Physics and philosophical Problems,
D. Reidel, 1974, p.24 in Lestiennes Rémy, Les Fils du Temps,
causalité, entropie, devenir, Paris, Presses du CNRS, p.184.
25 - Lestiennes, op. cit., p.187
26 - ibid
27 - Fedida,op. cit., p.15
28 - ibid, p.13
29 - ibid, p.54
30 - ibid, p.16
31 - ibid, p.37
32 - Entrevue avec Sam Taylor-Wood, Par Clare Carolin in Steild
(hrsg.), Sam Taylor-Wood.
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